

Bonjour les amis,
Depuis trois jours ... le soleil refait surface par chez nous, on y croit !
Pour ce week end, que vous soyez en vacances ou chez vous ...
Je vous invite à suivre cette belle histoire tirée de "l'almanach des Gens du Nord 2003" ..
Elle fera peut-être ressurgir quelques souvenirs pour certaines d'entre vous …

LA BASSINE A CONFITURE

Dans le grenier abandonné d'une ferme, au fond d'une malle d'osier, au milieu de la paille, je dormais,
moi une bassine à confiture,
depuis si longtemps que je ne saurais le dire !
Un matin, de la cour, j'entendis monter un brouhaha, peu à peu il se rapprocha,
puis l'escalier gémit, la porte grinça,
le parquet craqua sous des claquements vifs de talons,
le couvercle de la malle émit, en se soulevant, une plainte lugubre.
Je sentis, la paille frémir, deux mains me saisirent, me tirèrent,
me sortirent de ma cachette, et me présentèrent au grand jour.
"Tu es magnifique, mais très sale !"

Etonnée, je regardais ces mains.
Elles étaient fines et racées, blanches avec des ongles très longs et d'un rouge éclatant,
je n'en avais jamais vu d'aussi belles,
celles qui s'occupaient de moi jadis avaient souvent des ongles cassés,
elles étaient par fois rugueuses, elles ne prenaient pas plus soin d'elle que de moi !
"Je vais te rendre ta splendeur passée et te trouver une place digne de toi".
Les mains courageusement se mirent au travail, elles m'offrirent :
un bain tiède, un massage énergique avec une brosse, un rinçage, un séchage.
Les yeux m'examinèrent sans indulgence :
"Recommençons".
Une fois.
"Recommençons".
Deux fois.
Là, je me fâchai et je protestai à ma façon, je leur cassai un ongle . Deux ongles.
"Zut, ils étaient si beaux!"
A qui pouvaient-elles appartenir ces mains si coquettes et si courageuses ?
Et j'entendis : "Alexandra, tu viens?"
Elles me posèrent : "Je reviens".

Epuisée, je m'endormis … et fus réveillée brutalement, mon supplice recommença.
"Avec du citron, tu seras éclatante."
Les vertiges s'emparèrent de moi : sur le fond, le côté, sans dessus dessous et elles frottaient ...
J'avais chaud, j'avais très chaud …
De cuivre jaune je crus devenir cuivre rouge,
tiens, j'y pense, aussi chaud que lorsque Bonne-Maman faisait ses confitures,
car j'ai connu les flammes de la cheminée, elles me léchaient avec frénésie,
puis le dessus brûlant de cette cuisinière, presque incandescent, par le bois qui s'y consumait.
Un ongle se coinça dans l'anse,
clic ... un autre se retourna, clac … deux dents voraces les serrèrent, les achevèrent,
et les mains s'arrêtèrent , exténuées, moi anéantie.
Les yeux me scrutèrent de nouveau à nouveau : "Tu me plais."
Délicatement, les mains m'effleurèrent, me prirent, m'emportèrent dans le vestibule.
Surmonté d'une immense glace, un vieux bahut patiné m'attendait.
Elles me posèrent au centre, Alexandra se recula, hocha la tête :
"Tu es vraiment belle."
La glace me renvoyait l'image, oui j'étais vraiment très belle.
"Attends un peu, je te réserve une surprise!"
"Encore, pensais-je."
Là je ne peux trouver le sommeil, le soleil me caressait, je m'admirais,
je rayonnais et j'attendais ma surprise ! ...
Lorsqu'elles revinrent, les mains portaient deux paniers remplis de petites plantes vertes fleuries,
elles les sortirent, l'essayage commença.
Je ne sais combien de fois, elles les posèrent, enlevèrent, reposèrent,
inclinèrent à l'avant, à l'arrière, à droite, à gauche,
elles voulaient me transformer en jardin miniature, élégant, original, odorant, coloré.
Je regardais d'un oeil amusé et curieux leur agitation, leur énervement lorsqu'un pot glissait !
Enfin, l'ensemble leur plu. Elles y placèrent un beau nœud de ruban, Alexandra conclut :
"Vraiment, il aurait été dommage que tu continues à te morfondre au grenier.
Ton charme fou va séduire tous mes amis, tu es vraie, tu es "campagne" !
Puis, elle regarda ses mains :
"Mes pauvres ongles, vous n'êtes plus présentables, tant pis, aucun regret,
ce petit ennui n'est rien en comparaison du résultat."
Alexandra m'enveloppa d'un regard amoureux : "A demain, ma belle, bonne nuit."
La maison devint calme.
Le bonheur m'envahit.
J'étais belle, j'embaumais, Morphée m'enleva.
(N'oubliez pas mes amis, le clic droit est autorisé pour enregistrer cette jolie histoire).
Au plaisir de vous retrouver lundi !